ARMES SILENCIEUSES POUR GUERRE TRANQUILLE (W. Cooper)

par L’équipe Scripto

« Armes silencieuses pour guerre tranquille » est un texte célébrissime de la galaxie conspirationniste. En 1991, il fut publié en annexe du livre « Behold a pale horse » de William Cooper, alors considéré comme le pape du conspirationnisme. Cooper prétendit que ce document avait été trouvé dans une photocopieuse achetée lors d’une vente de surplus militaires. Mais le plus probable est qu’il le rédigea lui-même, pour établir un « vrai-faux », c’est-à-dire un faux disant le Vrai.

La thèse générale est simple : depuis 1954, une Troisième Guerre Mondiale secrète a commencé. Elle oppose les élites aux peuples. Conduite essentiellement grâce aux techniques de l’ingénierie sociale inspirée des recherches menées pendant la Seconde Guerre Mondiale, resituées dans le cadre élargi des possibilités ouvertes par l’ère électronique, cette guerre vise à construire un contrôle social absolu grâce à la totale prédictibilité du comportement des foules. En arrière-plan, on reconnaît l’idée que les nations sont faites pour l’essentiel d’individus humains n’utilisant pas leur intelligence, et qu’on peut donc conduire comme du bétail.

Les classes inférieures doivent être entretenues dans une situation de perpétuelle insécurité matérielle, et tous leurs repères éducatifs, familiaux et culturels doivent être systématiquement désorganisés. De cette manière, les individus appartenant à ces classes se trouvent enfermés dès le plus jeune âge dans un devoir socialement prédéterminé, et leur capacité à cartographier les processus de leur insertion dans le système est si faible qu’il n’y a aucun risque qu’ils pensent les catégories fondatrices de la révolte, sans parler de la révolution.

Les armes silencieuses utilisées pour enfermer les classes inférieures dans cette situation de totale aliénation fonctionnent de la manière suivante : elles créent des situations, fabriquées délibérément à partir des octets d’information enregistrés dans les ordinateurs servant à l’ingénierie sociale. Elles produisent un bruit qui se perd dans le bruit de fond de la société, pour ceux qui ne sont pas exercés à le repérer, mais qui est très reconnaissable pour les spécialistes. Les cibles elles-mêmes ne comprennent pas ce qui leur arrive. Elles tentent de s’adapter jusqu’au moment où elles craquent, et généralement, elles n’ont même pas conscience d’avoir été attaquées.

Le principe de base utilisé par ces armes a été défini dès le XVIII° siècle par le banquier Mayer Rothschild : « Lorsque vous prenez l’apparence du pouvoir, les gens vous le donnent bientôt. » Ce banquier comprit que les dépôts bancaires avaient l’apparence du pouvoir, et qu’ils pouvaient induire les gens à adopter un certain comportement, échanger leur richesse présente contre une promesse de richesse future plus grande.

Cette inductance de la richesse fonctionnait sur l’espace mental comme l’inductance électrique fonctionne sur un champ magnétique. Elle permit à Rothschild de récupérer d’énormes richesses réelles, en échange de simples promesses de richesses futures qu’il n’avait à honorer que par la reconduction de ces promesses. Ainsi, Rothschild comprit tout simplement que l’argent pouvait être fabriqué à partir de la dette, et que celui qui maîtrisait ce système pouvait le réarranger presque à sa guise, déclenchant des guerres, au besoin, pour éliminer une partie des titulaires de promesses de richesse future qu’il ne pouvait pas honorer.

Ce principe de base fut, à partir du XX° siècle, resitué dans le cadre de technologies bien plus performantes. L’utilisation de modèles prédictifs fins permet désormais de manipuler cette « inductance » avec la plus grande précision. Afin de déterminer les seuils de résistance des diverses « matières » de l’ingénierie sociale, les chercheurs utilisent la technique du « shock-test », consistant par exemple à tirer profit d’une grève pour déterminer le seuil à partir duquel, du fait de la désorganisation de l’économie et des variations de prix induites, le comportement des consommateurs évolue significativement. La connaissance de ces seuils, combinée avec les possibilités de simulation mathématique complexe grâce aux ordinateurs, permet désormais aux spécialistes en marketing, et d’une manière générale aux ingénieurs sociaux, de déterminer à l’avance le comportement du public. L’argent est fabriqué à partir de la dette, et les prix sont déterminés à partir du comportement prévisible du public. L’ensemble de la sphère économique devient ainsi un objet totalement modélisable, un peu à la manière d’un circuit électrique : la capacitance étant le capital, la conductance la marchandise et l’inductance le service.

Cette économie totalement modélisable doit servir de cadre à un projet général de contrôle social dont l’objet est le suivant : retarder suffisamment l’élévation du niveau éducatif des dominés, pour qu’ils n’aient pas le temps de refuser la domination avant que, grâce au progrès technologique (et en particulier grâce à la maîtrise de sources d’énergie illimitée), la domination de l’Elite ne soit devenue impossible à renverser. Il s’agit donc, pour l’Elite, de gagner une course de vitesse entre le progrès éducatif dans les classes inférieures et le progrès technologique qui permettra, un jour, de se passer de la force de travail représentée par ces classes.

Dans le cadre de l’économie totalement modélisable, l’Elite a la possibilité de remodeler très largement l’ensemble du cadre de vie des individus et des groupes dominés. Ainsi, on fournit aux classes populaires une éducation de bas niveau, en particulier en mathématique, en logique, en design des systèmes et en économie, tout en encourageant tout ce qui est du domaine de l’émotion par une succession d’affronts émotionnels, images de violence et de sexe, sport-spectacle exaltant à la fois le corps contre l’esprit, et la passivité du spectateur. La règle générale pour renforcer sans cesse ce basculement dans l’émotionnel, une fois l’éducation classique anéantie, est de créer des problèmes émotionnellement perturbants, pour ensuite proposer des solutions émotionnellement rassurantes, mais fonctionnant toujours fondamentalement sur le mode de l’émotion. Pour garantir que le public ne prendra pas conscience de ce processus, il est en outre conseillé de le tenir constamment occupé, soit par la distraction (d’un niveau intellectuel très bas), soit par le travail (de préférence abrutissant et répétitif).

Une fois les individus radicalement dominés par la sphère émotionnelle, on constatera qu’ils se replient sur des besoins fondamentaux très simples, et très infantiles. Ils percevront l’Etat comme un utérus artificiel, et attendront des politiciens qu’ils les protègent. Incapables d’affronter la brutalité du monde, n’ayant pas l’équipement intellectuel pour le penser, les sous-citoyens abrutis produits par les armes silencieuses sont de parfaits clients pour l’Etat-providence (sous toutes ses formes), qui ne demanderont plus que la sécurité, et ne comprendront même plus les notions de liberté ou de responsabilité.

Ce type de public sera parfait pour soutenir un effort de guerre, pourvu que la guerre soit lointaine, qu’elle ne le concerne pas directement, et que le fait d’agresser des gens éloignés soit perçu comme un bon moyen de défendre l’Etat-Utérus. Cela sera particulièrement utile quand, pour rééquilibrer le système déstabilisé par l’accumulation de l’argent-dette, sous-jacent invisible à l’ensemble du contrôle social, il faudra faire la guerre pour détruire le créditeur. Il est à noter que si le système ne fonctionnait plus, alors la destruction du créditeur ne pourrait plus être obtenue qu’en laissant le peuple se détruire lui-même.

Voici, en résumé, le contenu d’« Armes silencieuses pour guerre tranquille », LE texte culte de la galaxie conspirationniste américaine.

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On trouvera ici « Armes silencieuses pour guerre tranquille ».

Qu’en dire ?

On pourra sourire à certains des parallèles pseudo-scientifiques de Cooper. Mais, sans nécessairement adhérer à tous les détails de son exposé, on reste muet devant l’écho pris, soudain, depuis le 15 septembre 2008 et la faillite de Lehman Brothers, par la conclusion d’« Armes silencieuses pour guerre tranquille ». Un texte à lire, à coup sûr !

Source : http://www.scriptoblog.com – 05.03.2009

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